11.01.92 – 16.02.92
Harald F. Müller
Harald F. Müller
Commissariat : Christian Bernard, Axel Huber
On a vu à Nice le travail d’Harald F. Müller dans Le Désenchantement du monde (Villa Arson, été 1990) et, plus récemment, à la galerie Air de Paris, durant l’été 1991. C’est une exposition personnelle qui le ramène à la Villa Arson en janvier 1992, dans le cycle Is it about a sculpture ? de la Galerie Carrée où il succède à Adrian Schiess et où il précède, entre autres, Gerwald Rockenschaub.
Jusqu’alors, Harald F. Müller exposait ensemble des travaux distincts de photographie et de sculpture, en fait un seul type de sculpture formé de deux parallélépipèdes bleu sombre, verticaux et symétriques, dont la présence obscure évoquait aussi bien le mystérieux monolithe d’Odyssée 2001 qu’une sorte de Kaaba profane mais néanmoins chargée d’aura.
Dans la Galerie Carrée, la sculpture change cette fois d’aspect et de dimensions au point de constituer un imposant bloc opaque sur lequel sont accrochées les photographies. Ainsi la sculpture devient-elle une architecture où s’emboîtent l’archétype de la chambre et celui de la maison, tandis que les photographies y ouvrent des fenêtres picturales. Mais, par leur taille comme par leur décollement de la cimaise, ce sont aussi des objets sculpturaux du troisième type. Rappelons qu’Harald F. Müller ne réalise pas ses clichés ; il les choisit le plus souvent dans des publications techniques d’entreprise.
Ces images ont un caractère déplacé : légèrement déqualifiées, elles présentent une forme d’objectivité méta-esthétique qui lève un certain sentiment d’inquiétante étrangeté. Leur fort agrandissement les picturalise en faisant apparaître la trame typographique qui en révèle l’origine imprimée. Le contraste entre ces reproductions de grande série et dont la finalité est déconnectée, et leur seconde reproduction, quasi-monumentale, sous l’impeccable glacis du cibachrome, trouble insensiblement l’idée que nous nous faisons de la nature des images. Et cela d’autant plus que sans cesse y passent les reflets du monde et de leurs regardeurs. Par où l’on voit que les miroirs n’ont pas fini de changer de visages.