24.11.07 – 3.02.08
Claire Fontaine
Équivalences
Commissariat : Éric Mangion
Le Centre national d’art contemporain de la Villa Arson présente quatre expositions monographiques. Les quatre artistes (Claire Fontaine, Laurence Denimal, Tatiana Trouvé et Zoé Leonard), pourtant fort différentes dans les formes et supports proposés, ont toutes en commun de révéler des modes et des chaînes de production, qu’ils soient artistiques, économiques ou politiques, fictifs ou réels.
Collectif fondé à Paris en 2004, Claire Fontaine tire son nom d’une marque populaire de cahiers pour écoliers. Depuis ses débuts, Claire Fontaine se déclare artiste ready-made et élabore une version de l’art dont la caractéristique principale est d’interroger la crise de la singularité dans nos sociétés contemporaines. En ce sens, les œuvres de Claire Fontaine se présentent souvent comme des feux de détresse visant à éclairer, soit de manière poétique et distanciée, soit parfois de manière plus frontale, les contradictions de notre société.
Sous le titre Equivalences, l’exposition réunit un ensemble de nouvelles pièces produites pour l’occasion. La première est une sculpture (citation explicite des Equivalents de Carl Andre) composée de cent vingt briques entourées chacune d’une couverture différente de livre de poche. Alors que la deuxième, Lever, est un détournement tautologique de la pièce homonyme d’Andre basé sur l’itération de la brique-livre Différence et Répétition de Gilles Deleuze dans l’édition américaine. Puis, au plafond, une phrase brûlée avec la flamme d’un briquet parle de la grève sans usine des féministes italiennes des années 1970. Au mur, une accumulation de dix sérigraphies colorées du visage de la Marilyn de Warhol sont oblitérées par l’inscription « One is no one ». Dans un écran, on peut voir Étant donnés, une vidéo où des corps, que l’on devine à peine derrière le brouillage des chaînes cryptées, performent l’éternelle répétition pornographique. L’autre vidéo est une projection intitulée Échographies dans laquelle une compilation d’échographies tridimensionnelles venant du site internet You tube nous mettent face à la physionomie confuse des habitants des limbes de la vie fœtale rendue absolument publique. Ces deux travaux se présentent comme une réflexion autour de la visibilité et de l’opacité des corps, et sur la manière dont la technologie se met au service de notre besoin de voyeurisme ou d’exhibition. Pendue au plafond, une petite sculpture regroupe un ensemble de clés passe-partout utilisées par les braqueurs, assorties de plumes servant d’appâts et de hameçons pour la pêche. Leurre est une pièce particulière de la série des passe-partout, car elle présente le vol et la violence de la séduction rétinienne comme les deux terrains privilégiés de l’art contemporain.
Laurence Denimal réalise en 1997-1998 des livre-éponges (volontairement pervers et ludiques). L’année suivante, elle inaugure des textes-canevas sous forme de fiches. En 2001, elle crée des organes et des accessoires liés au corps, en skaï ou fausse fourrure, pour en faire surgir un alphabet organique. Depuis 2004, elle expérimente une écriture sous forme de nomenclatures et de codes couleurs. Dans cette logique, elle réalise un joubor (journal de bord). « Chaque jour, une base de données du quotidien, mêlant l’intime et l’actualité (dépêches AFP et Reuters). Aucune hiérarchisation, si ce n’est l’inscription de chaque événement dans son temps. Aucun commentaire : la matière à penser est dans la confrontation des données, dans l’espace créé par la juxtaposition des évènements. Chaque page du joubor n’est pas seulement la page achevée d’un livre à paraître, mais, essentiellement le matériau d’un nouveau travail d’écriture. Et cela ad libitum. »
L’exposition permet de découvrir une partie du joubor à travers l’installation de vingt-cinq classeurs présentés comme des archives consultables dans un esprit de salon de lecture. Au-delà d’une histoire personnelle, c’est toute une analyse de notre société qui est ainsi mise en exergue à travers ses hiérarchies et ses composantes socioéconomiques.
La Villa Arson et les éditions New Al Dante co-produisent une édition en tirage limité du joubor.
La Villa Arson est un établissement public administratif sous tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication. Elle reçoit le soutien du Conseil Général des Alpes-Maritimes, de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur et de la Ville de Nice. L’American Center Foundation a attribué une allocation spécifique pour la réalisation de ces expositions, dans le cadre de son soutien aux expositions et aux programmes artistiques.